Le sens de
l'engagement politique pour un chrétien
Les élections ne constituent qu'une infime partie
de la vie politique. La politique c'est avant tout la réflexion et l'action
collective sur l'organisation de la cité et la vie en société. En ce sens
l'Église a le devoir d'être une organisations politique! La vie politique se
joue avant tout dans la vie de tous les jours, dans les quartiers, dans les
entreprises, dans la rue.
Dans tous ces lieux, le chrétien doit s'investir et être
capable d'y repérer les injustices qui l'entourent, de comprendre ce qui en est
à l'origine et de lutter avec d'autres pour y mettre fin.
Cet engagement politique n'est pas une simple possibilité
pour le croyant, c'est un devoir ! L'épître de Jacques nous dit «Soyez les
réalisateurs de la Parole, et pas seulement des auditeurs qui s'abuseraient
eux-mêmes».
Oser regarder les injustices et ce qui les cause
La Bonne Nouvelle de Jésus-Christ nous invite à
oser regarder les injustices et ce qui les cause en face, plutôt que de les
ignorer en faisant semblant que tout va bien. Elle nous interdit d'avoir la
lâcheté de rejeter sur des responsabilités individuelles les injustices
provoquées par l'organisation profondément injuste de notre société. Ce devoir
politique du chrétien est très bien résumé dans le livre d'un ancien jociste1
qui nous dit :
«Comment prétendre aimer ses frères et supporter
que le moindre d'entre eux soit exploité? Comment aimer toute l'humanité et
accepter que des peuples entiers soient opprimés ? Comment aimer et tolérer la
répression et la domination de quelques-uns sur les grandes masses ? Comment
aimer, oui vraiment! Comment aimer à l'image d'un Dieu Amour et rester indifférent
à la souffrance des hommes et des femmes ?»
« Tant qu'un seul homme à travers le monde n'est pas libre,
je ne peux pas être un homme libre », écrivait Camus.
Pour le chrétien qui croit en Dieu Amour, il en
est ainsi. Toute sa vie doit être tendue dans la lutte permanente contre tout
ce qui exploite, opprime, aliène l'homme. Toutes ses forces et toute son
énergie doivent y être engagées.
Stéphane Haar
président de Jeunesse Ouvrière Chrétienne (Joc)
1 Fredo Krumnow, Croire, Les Éditions ouvrières,
coll. Le feu de la vie, 2e éd., p. 25, 1983
«L'Église ne peut ni ne doit prendre en
main la bataille politique pour édifier une société la plus juste possible.
Elle ne peut ni ne doit se mettre à la place de l'État. Mais elle ne peut ni ne
doit non plus rester à l'écart dans la lutte pour la justice. Elle doit
s'insérer en elle par la voie de l'argumentation rationnelle et elle doit
réveiller les forces spirituelles sans lesquelles la justice, qui requiert
aussi des renoncements, ne peut s'affirmer ni se développer. La société juste
ne peut être l'œuvre de l'Église, mais elle doit être réalisée par le
politique. Toutefois, l'engagement pour la justice, travaillant à l'ouverture
de l'intelligence et de la volonté aux exigences du bien, intéresse
profondément l'Église»
(Benoît
XVI, Encyclique Dieu est amour § 28)
Avant
l’élection présidentielle, voici les « points de discernement » pour les
électeurs chrétiens présentés par la Conférence des évêques de France.
Certains
touchent assez directement des sujets d’actualité. Extraits.
Vie
naissante : « Chaque personne est unique aux yeux de Dieu. (…)
L’engagement résolu des chrétiens n’est pas dicté d’abord par une morale mais
par l’amour de la vie que ni la maladie ni l’âge ne peut amoindrir. Il est
impératif que les autorités publiques refusent l’instrumentalisation de
l’embryon. De même, l’avortement ne peut en aucun cas être présenté comme une
solution pour les mères en difficulté (…). »
Famille : « En créant l’être humain “homme et femme”,
Dieu a suscité une relation de complémentarité à la fois biologique et sociale
qui se retrouve dans toute la société. La différence sexuelle de l’homme et de
la femme est fondatrice et structurante de tout le devenir humain. (…) La
famille, fondée sur l’union durable de l’homme et de la femme, doit être aidée
économiquement et défendue socialement car, à travers les enfants qu’elle porte
et qu’elle éduque, c’est l’avenir et la stabilité de la société qui sont en
jeu. »
Banlieues
et cités : « Depuis quelques années, malgré des efforts répétés,
certains quartiers et certaines cités deviennent des lieux de violence, de
trafics. Plus généralement, certains de leurs habitants s’y trouvent enfermés,
ne parvenant pas et parfois ne voulant plus prendre pied dans la société
globale. Une politique purement répressive ne saurait suffire ni résoudre les
problèmes de fond. Des efforts d’aménagement, notamment de renouvellement de
l’habitat et des transports, sont nécessaires (…). »
Économie
et justice : « (…) Les autorités publiques doivent créer les
conditions d’une plus grande justice dans la vie économique en veillant à
l’équité des salaires, des prix et des échanges. L’équilibre de la société
exige la correction des écarts disproportionnés de richesse. »
Immigration : « (…)
L’Église reconnaît à tout homme le droit d’émigrer pour améliorer sa situation,
même s’il est regrettable que tous ne puissent pas survivre dans leurs pays.
Mais dans un monde aussi organisé que le nôtre, une régulation des migrations
est nécessaire. Elle ne peut pas se réduire à une fermeture protectrice des
frontières. Elle doit permettre d’accueillir au mieux ceux qui se présentent,
avec respect et sérieux, et en leur offrant une vraie possibilité
d’intégration. »
Fin de vie : « Toute
personne, quel que soit son âge, son état de fatigue, son handicap ou sa
maladie, n’en garde pas moins sa dignité. Pour cette raison, « l’euthanasie
est une fausse solution au drame de la souffrance, une solution indigne de
l’homme » (Benoît XVI) car elle vise, sous prétexte de
compassion, à abandonner les personnes au moment où elles ont le plus besoin
d’aide et d’accompagnement. L’arrivée de générations importantes dans le grand
âge doit inviter la société à une plus grande solidarité. Le développement des
soins palliatifs, fruit d’un progrès éthique et scientifique, doit être poursuivi
pour que tous ceux qui en ont besoin puissent en bénéficier. »
«
Les autorités publiques doivent créer les conditions d’une plus grande justice
dans la vie économique en veillant à l’équité des salaires, des prix et des
échanges. »
Conférence des évêques
de France
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